Notre commune et sa population

Notre commune est souvent connue pour être une des plus rurales et surtout les moins peuplées du pays. Cette réputation lui vient, certainement, de sa situation unique de très petit canton électoral, qui lui vaut souvent, le soir des élections, d’être dépouillée dans les premières.

Nous étions encore il y a peu dans les cinq communes les moins peuplées de Belgique. Les chiffres de 2015 nous placent, avec 2215 habitants à 580e place sur 589 communes.

Il est intéressant de se pencher sur les chiffres de population de ces deux derniers siècles, car ils racontent – à leur manière – l’histoire de nos villages.

Recensement de 1846
Commune de Fauvillers
Fauvillers 407 habitants
Bodange 439 habitants
Hotte 157 habitants
Menufontaine 81 habitants
Wisembach 202 habitants
Commune de Hollange
Hollange 467 habitants
Burnon 70 habitants
Honville 219 habitants
Malmaison 52 habitants
Sainlez 174 habitants
Srainchamps 127 habitants
Commune de Tintange
Tintange 350 habitants
Oeuil et Romeldange 28 habitants
Warnach 322 habitants

Les recensements de population n’ont évidemment pas attendu l’indépendance de la Belgique. On se souviendra aisément qu’un tel évènement est même relaté dans la Bible, sous l’empereur Auguste. Cela dit, si des recensements ont lieu dans notre pays en 1801, 1806, 1811, 1816, ils sont particulièrement incomplets pour la Province de Luxembourg et seulement 40 à 60 communes y participent alors.

À l’époque, nous sommes en pleine période napoléonienne, notre commune appartient à la France, au sein du Département des Forêts. Le Gouverneur de la Province, qui entre en fonction après l’indépendance de 1831, signale d’ailleurs que bon nombre d’archives communales ont été perdues lors des invasions qui ont accompagné la fin de l’empire français.

Le premier recensement d’envergure en Belgique a lieu en 1846 et nous donne une vision précise de la situation de nos villages. L’ensemble de la commune compte 2582 habitants, soit trois cents de plus qu’aujourd’hui. Pour être précis, la commune de Fauvillers compte alors 1076 habitants, celle de Hollange, 806 habitants et Tintange, 700 habitants.

Ces chiffres peuvent paraitre surprenants aujourd’hui. En effet, la Belgique ne compte alors que 4 337 196 habitants, contre 11 000 000 de nos jours. C’est que la révolution industrielle n’est pas encore passée par là. En 1846, seul un million de Belges habitent dans les villes. En Province du Luxembourg, la population urbaine est alors de 23 000 personnes, alors que 163 000 personnes vivent dans les villages de la verte Province.

Pourtant, l’exode rural est déjà amorcé. On s’étonne par exemple de voir Arlon grossir toujours plus : la ville compte 5221 habitants en 1844, alors qu’à la fin de l’empire français, elle n’en comptait que 2848.

C’est l’essor industriel du pays, accompagné de celui des moyens de communication, qui amplifie le phénomène. En 1835 déjà, la Belgique a inauguré la ligne de chemin de fer Bruxelles-Malines, la première ligne à vapeur d’Europe. Les populations quittent les campagnes pour les villes afin de trouver un emploi dans les usines qui émergent au cours du XIXe siècle, ou dans les services qui se développent également dans les centres urbains. Les chaines d’approvisionnement se développent et permettent d’acheminer tous les biens là où se concentre la population. Il n’est plus nécessaire d’habiter à proximité de zones agricoles pour manger à sa faim…

L’histoire est connue et est toujours d’actualité : il devient plus facile de se déplacer, d’aller chercher en ville les produits qui y sont acheminés et peu à peu, les commerces, les artisans, les petits producteurs quittent les villages.

Dans un premier temps, Fauvillers résiste bien. Il faut le temps que le phénomène gagne la Province. Au recensement de 1856, la population a encore augmenté pour atteindre 2814 habitants. Mais à la fin du siècle, en 1900, l’exode rural commence à se faire sentir, la population diminuant à 2621 habitants. Les deux guerres, avec les mouvements de population, les combats aussi dans nos régions, accentuent le phénomène. En 1947, notre commune ne compte plus que 2005 habitants.

C’est la deuxième partie du XXe siècle qui sera la plus sensible pour nos villages et qui marquera clairement la diminution de la population, et partant des petits commerces et des services : en 1990, la population de la commune est tombée à 1642 habitants… près de 1200 habitants de moins qu’un siècle plus tôt.

Dans les années 90, la population entame alors une période de croissance rapide, sous la pression économique du Grand-Duché du Luxembourg. De nouveaux habitants viennent s’installer en nombre, les jeunes de nos villages restent plus volontiers que par le passé – notons au passage que Fauvillers est aussi une des communes les plus jeunes de Belgique. De plus en plus, également, c’est un autre confort de vie que nos citoyens recherchent. Paradoxalement, c’est aussi le développement des moyens de communication privés qui a permis de venir s’installer dans des communes rurales, parfois à plusieurs dizaines de kilomètres de son lieu de travail.

Cette période est sans doute une opportunité à saisir pour permettre à nos villages de redévelopper peu à peu des services de qualité et des circuits de distribution à courte échelle, afin de retisser cette qualité de vie dans nos villages que l’exode rural a détricoté pendant près d’un siècle.

Pour le cercle d’Histoire et d’Archéologie de la Haute-Sûre, Hans Welens, Roger Kaufmann et Nicolas Stilmant.

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